Cette fois-ci nous retournons sur les lieux avec un œil qui sera différent puisque nous sommes accompagnés d'une guide passionnée qui va nous aider à décrypter ce village, tant au niveau historique que géographique ou même géologique.
Si cette guide est passionnée c'est qu'elle est la présidente fondatrice de l'association
"Allan, Pierres et Mémoire" qui entreprit en 1988 de redonner une deuxième vie au vieux village en le faisant découvrir ou redécouvrir au public ainsi qu'à la nouvelle génération d'habitants, en racontant son histoire, pour comprendre pourquoi celle-ci fut imprégnée de dissensions et de rancœurs.
C'est donc avec le cœur autant qu'avec la tête qu'elle commence par parler de l'association.
Comme elle le raconte, consciemment ou non, le vieux village fait partie de la vie des habitants. Surmontant le nouveau village du haut de son rocher, il ne se passe pas un jour sans qu'un Allanais ne lance un regard vers ses ruines. Mais jusqu'en 1988 les lieux étaient à l'
abandon, les constructions fragilisées par les pillages, les secousses sismiques, l'érosion, les lierres qui enserraient les pierres tant et si bien que l'on interdisait aux enfants d'y aller jouer tant l'endroit était dangereux. Personne ne savaient réellement ce qu'il y avait sous la végétation.
En 1988 l'association se crée avec pour but la sauvegarde et la restauration du vieil Allan. Avec beaucoup de difficultés et peu de moyens au départ. Petit à petit ils dégagent les pierres, créent des voies d'accès. Pour continuer ils ont besoin de fonds. Outre les collectivités et mécènes locaux ils montent des spectacles dont les bénéfices permettent de consolider les murs menaçants de s'écrouler, de remplacer les pierres de tailles volées. Ils font également appel à des chantiers de jeunes bénévoles. Des architectes viennent sur place ainsi que des historiens.
L'histoire du vieil Allan avant son abandon commence au XIIème siècle et se termine en 1901, date à laquelle la dernière habitante quitte les lieux.
Le village est ceinturé de remparts ouverts par quatre portes.
Après un arrêt à la
porte Neuve, celle qui est la plus visible de la plaine et dont certaines pierres ont été remplacées...
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Les pierres remplacées sont de couleur différente |
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Machicoulis |
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Les corbeaux de la Porte Neuve
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La porte Neuve de l'intérieur. La maison du gardien se situait au premier étage. |
...nous suivons le chemin de Maupas (de mauvais pas) qui longe le rempart, pour arriver à la
porte de la Fontaine.
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Porte de la fontaine |
C'est ici qu'habitants et animaux venaient chercher l'eau qui arrivait de la montagne et les femmes venaient laver leur linge dans ce
lavoir.
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Le lavoir a été dégagé, il était comblé de terre et enfoui à hauteur du niveau du sol à l'arrière |
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Pierre de réemploi du lavoir |
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Grâce à un legs reçu par l'association, l'eau coulera bientôt à nouveau dans la fontaine |
Nous prenons les escaliers (mis en place par l'association) et longeons le rempart récemment consolidé.
Nous sommes aux abords de la partie la plus ancienne du village, là où a été édifié le premier château au XIIème siècle par la famille
Adhémar de Monteil.
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Rempart nord du XIIème siècle |
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Porte du château et tour de ronde équipée pour arquebuses |
Cette famille pour affirmer sa puissance a fait construire plusieurs châteaux sur des promontoires autour de Montélimar, ville où fut bâti le premier palais et à laquelle ils donnèrent leur nom (Montélimar est la contraction de "Mont des Adhémar"). Ont ainsi par exemple appartenu aux Adhémar
le château de Grignan et celui de
Rochemaure.
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Donjon du château haut. Il fut intégré par la suite aux remparts (à droite) |
En 1337 une partie de la seigneurie d'Allan est vendue aux comtes de Provence. La seigneurie est divisée, un autre donjon est construit. Les enceintes ont été modifiées, agrandies, la château réaménagé au fil des seigneuries qui se sont succédées ou qui se sont partagés les lieux. Ainsi de nombreuses ouvertures sont bouchées, d'autres au contraire ont été crées.
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Des ouvertures ont été murées, les créneaux comblés. |
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Porte du "Portalet" avec ses pierres ajustées en longs claveaux |
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Pavés de la grande rue que l'association espère restaurer un jour |
Il y eut trois lieux de cultes sur place. La dernière
église fut construite dans une ancienne tour qui appartenait à une enceinte fortifiée.
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De l'intérieur de l'église |
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Détail de l'autel de l'église |
En passant par le presbytère à l'arrière on accède à l'emplacement du vieux cimetière avec une vue superbe sur la maison des chevaliers, maison bourgeoise dont la façade est pourvue de fenêtres à
meneaux.
On situe au XIVème siècle l'extension définitive du village. Il avait fini au fur et à mesure de ses extensions par reculer au maximum ses remparts. La vie au village était difficile, les chemins caillouteux et raides, les ruelles devenaient étroites. De plus l'avènement de la
sériciculture introduite dans la région par Olivier de Serre obligeait les éleveurs à posséder de vastes magnaneries qui trouvèrent l'emplacement idéal dans la plaine, proche des voies de communication en plein essor notamment avec la construction de ponts sur le Rhône pour faciliter les échanges et le commerce (dont la construction du pont de Viviers en 1845).
L'avenir et le progrès étaient en bas.
Contrairement à de nombreux villages perchés obligés comme Allan à s'agrandir, ce dernier ne connu pas la même évolution. Couramment la plupart des villageois qui se retrouvent à l'étroit à l'intérieur de l'enceinte de leur village l'agrandissent en construisant de nouvelles habitations à l'extérieur des remparts, utilisant d'ailleurs celui-ci comme mur d'appui.
Ici à Allan une telle extension était impossible, car si le village lui même était construit sur de la roche, le sol friable qui l'entourait empêchait toute nouvelle construction. Il a fallu envisager un déménagement total du village. Un déménagement signifie un transfert des symboles religieux et administratifs : mairie et église devaient être reconstruites dans la plaine, au lieu dit "La Begude" dont le nouveau village prendrait le nom.
Mais cette décision qui pour certains était une nécessité ne fut pas partagée par d'autres. Une scission se produisit entre les villageois qui souhaitaient le déménagement et ceux qui étaient contre l'abandon du village. Pour attirer une partie de la population à la Bégude, on construisit en hâte un temple, satisfaisant ainsi les villageois de confession protestante qui jusque là exerçaient leur culte chez des particuliers.
Parmi les manifestations des dissensions qui régnaient en ces lieux, le vol de la cloche de l'église du vieux village, symbole fort de la vie d'une cité. Devant le scandale, la cloche finit par être remontée. On imagine aisément une ambiance à la Don Camillo ! En 1857, le village en bas, à la Bégude fut déclaré seul centre paroissial puis communal, les cloches redescendirent définitivement.
Petit à petit le village se vida de ses habitants, les matériaux furent récupérés pour reconstruire les maisons et fermes du nouveau village. On vendit les matériaux de l'église et de la mairie aux enchères. Le village fut définitivement vidé de sa dernière habitante en 1901. Les secousses sismiques, les inondations, la végétation et les pillages s'occupèrent du sort de ce qui restait.
Les querelles entre villageois furent si intenses qu'un siècle après les rancœurs pesaient encore parmi certains villageois. La création de l'association permit de réconcilier les Allanais avec leur passé.
Le vieux village d'Allan est protégé au titre des
monuments historiques depuis 1989.
D'autres photos
ici
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10 commentaires:
Bonjour,
Comme d'hab c'est bien documenté. Le compliment est mérité.
Une question : avec un guide éprouve-t-on un manque de liberté ou au contraire l'avantage d'avancer avec méthode dans la découverte des lieux.
A+
Avec un guide, tout s'éclaire. J'avais déjà fait la visite sans, on ne peut alors que faire des suppositions sur ce que l'on voit (tiens ça on dirait une église, et ça c'est quoi). Et puis surtout on a l'histoire, racontée par quelqu'un du cru. A mon avis, il faut faire les deux, mais la visite guidée m'a beaucoup apporté.
Merci de ta visite Serge
Bonjour, votre visite au vieil Allan est toute ressente, car sur différentes photos on peut voir les travaux des derniers chantiers réalisés sur le site. Je fais partie de l'association de sauvegarde du site qui oeuvre en partenariat avec la mairie. Allan, Pierres et Mémoire, en son nom je vous félicite du récit ''exact'' que vous avez fait de l'histoire de notre vieux village...mais je suppose que vous avez fait la visite guidée avec Martine, qui a du vous rendre amoureux du site!!! moi, je l'aime notre vieil Allan. bien à vous; Nathalie
64L'association ''Allan Pierres et Mémoire'' organise pour les journées du patrimoine qui auront lieu le samedi 15 de 14h à 18h et le dimanche 16 septembre de 10h à 12h et de 15h à 18h, dans la salle du Temple, une exposition de photographies sur le thème '' le Patrimoine Caché d'Allan'' avec des sous catégories comme ''Allan patrimoine d'antan'', ''Allan patrimoine autrement'', ''Allan patrimoine de maintenant''.
A tous les amateurs de belles photos, Allanais ou pas, à tous les amoureux de notre patrimoine, vous avez l'été pour dénicher des lieux insolites, des lieux méconnus de notre patrimoine d'Allan.
Cette exposition sera ouverte à tout public et la participation en sera gratuite, chaque participant pourra présenter le nombre de photos qu'il souhaitera, tous les formats seront acceptés mais devront être encadrés ou protégés. Chaque tirage devra porter obligatoirement les noms, prénoms, adresse et numéro de téléphone de participants inscrits au verso.
Les dates du dépôt des photos sont fixées au samedi 8 septembre de 10h à 12h et le mercredi 12 septembre de 16h30 à 18h30 au Temple. Le thème de l'exposition devra être obligatoirement respecté. Un vote du public élira la plus belle photo dont le photographe gagnera 2 places pour le spectacle de l'association Allan, Pierres et Mémoire, les Misérables du 25 juillet 2013.
Tous renseignements complémentaires pourront être obtenus par téléphone au 04 75 91 56 92 ou 06 74 13 54 85 ou par mail artdesire26@aol.fr.
Bonjour Nathalie et merci de la visite. J'adore les vieilles pierres et j'adore quand on les fait parler alors j'ai trouvé mon compte lors de cette visite commentée par Martine. Je réalise que j'ai beaucoup parlé de l'histoire ancienne et peu du présent et du travail des bénévoles. Pour le récit je n'ai fait que retranscrire les mots de Martine, et l'émotion quelque part aussi qui était bien palpable ainsi que son engouement.
Bon courage pour la suite et à bientôt.
Bonjour,
Voilà pour quelle raison, j'ai intégré cette association de sauvegarde d'un site magnifique, lire ou entendre votre commentaire.Je suis également une passionnée des vieilles pierres et j'avoue qu'au vieil Allan, je suis servie.le travail des bénévoles est important en effet, mais il ne serait rien, si il n'y avait pas eu tout ce passé avant nous. alors que vous parliez de l'histoire du site, ne me dérange pas...c'est pour cela qu'en famille nous remontons nos manches et que nous œuvrons sur le site...pour qu'on n'oublie pas le passé. Merci beaucoup de diffuser à travers votre blog, nos vieux murs qu'on essaie de consolider. bien à vous. au plaisir en effet, peut être un jour de vous croiser dans les calades du vieil Allan. nathalie
Il semblerait que le nom "ALLAN" viendrait d'un peuple "ALAINS" origine peuple "HUNS" dont les descendants
se seraient établis dans la Drôme - Voir documents sur mur dans un jardin à Montélier -
2 frères ALAIN auraient vécus à VALENCE ....
Merci pour cette précision Anonyme et de votre visite.
Bonjour
Je suis Valentinois et je n'étais jamais venu à Allan, c'est fait et j'ai apprécier car l'histoire me fascine et quand je pense à ces gens qui ont vécus dans ce village pendant tant de temps avec les guerres, les croisades, les maladies, disettes etc. c'est fabuleux l'âme de ce village et quel chance nous avons de vivre avec plus de commodités, même si parfois je me dis que c'était plus joli avant.
Le courage et la force de ces gens pour bâtir à la force des bras
C'est sur il y avait la "sélection naturel" et beaucoup mourraient avant 50 ans max.
Mais j'ai pris des photos d'un (hypothétique endroit pour cuisiner et d'un (évier).
Au début ça ma fais penser à des latrines comme on vois dans des certains châteaux , mais non il n'y a pas d'évacuation. peut on savoir ce que c'est exactement?
Merci
Bonjour
c'est peut etre un four potager, le mieux est de demander à l'association.
Et oui, il y a eu pas mal de débroussaillage, découvrant de nouveaux trésors.
Bonne soirée
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